Société Française de Photographie

Fondée en 1854

Reconnue comme Etablissement d’utilité publique par décret

en date du 1er décembre 1892

Ayant pour objet le développement de la Photographie et de la Cinématographie

 

9, Rue Montalembert - PARIS (VIIè )

C. C. P. 321-76 Paris                                                                                                                                          Téléph.: 222-37-17

 

 

 

Feuille d’information N0 10 - Décembre 1964

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FERNAND BALDET

(1885-1964)

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M. Fernand BALDET qui nous honora de son amitié vient de dispa­raître, alors qu’il s’apprêtait à fêter son quatre-vingtième anniversaire. Il fut l’homme aimable et discret dont le commerce fut toujours agréable pour ceux qui l’approchaient.

A l’occasion de ses obsèques sa carrière fut retracée par M. DENISSE, directeur de l’Observatoire de Paris, et par M. GOUGENHEIM, président du Bureau des longitudes car il appartenait à l’un et à l’autre de ces hauts organismes.

Dessinateur en orfèvrerie dans sa jeunesse, il obtint le titre envié de premier ouvrier de France. Très jeune, par l’intermédiaire de M. TOUCHET, secrétaire général de la Société Astronomique de France, il fit la connaissance de Camille FLAMMARION, dont l’immense rayonnement et la forte personnalité le frappèrent beaucoup. Mais c’est surtout sa rencontre avec M. de la BAUME PLUVINEL, membre de l’Académie des Sciences, qui devait décider de sa carrière astronomique. Tout en travaillant pour lui, il poursuivit ses études et entra en 1911 à l’Obser­vatoire de Paris.

Il travailla ensuite pendant dix ans à l’Observatoire d’Alger, puis en 1922 fut nommé à l’Observatoire de Meudon. Docteur ès sciences physiques, il gravit les échelons de la hiérarchie et devint astronome titulaire en 1938. Sa haute compétence lui valut d’être secrétaire, puis président de la Société Astronomique de France. Lisant plusieurs langues étrangères et se tenant au courant des travaux publiés, il fut désigné comme président de la Bibliographie mensuelle de l’Astronomie.

Nommé en 1946 membre du Bureau des longitudes, il fut appelé, la même année, à la présidence de notre Société, dont il était membre depuis 1911 et, en 1949, à la fin de son mandat, le Conseil lui attribua le titre de président d’honneur.

 

Le Prix Louis Ancel lui fut attribué en 1926 par notre Société, pour ses travaux de spectroscopie.

Il était officier de la Légion d’honneur depuis 1951.

L’énumération de certains de ses titres ne rend pas un compte suffisant de ses travaux. Que l’on juge de l’importance des résultats acquis par quelques exemples

Le catalogue des étoiles fondamentales exécuté à l’Observatoire d’Alger a nécessité 23 662 observations de nuit, bien entendu. Il en fit 22 000. Ces observations ont permis de préciser, et l’on sait, ce que veut dire le mot précis en astronomie, la position de 872 étoiles. A Paris il a complété son catalogue par celui des étoiles de repère.

M. BALDET est universellement connu comme l’astronome des comètes. Il étudia le spectre des comètes si remarquables que l’on put voir dans le ciel entre 1907 et 1911, comètes de IIalley et de Morehouse, en parti­culier. Il installa à Meudon un laboratoire de spectroscopie avec géné­rateur à tension constante de 125 000 Volts pour compléter ses recherches et découvrit un nouveau groupe de bandes qui portent son nom. Ce sont ses travaux qui ont fait l’objet de sa thèse de doctorat ès sciences. Inventeur, il mit au point un nouveau prisme-objectif à rotation pour comètes et réalisa quelques films pour enregistrer l’évolution de ces objets célestes encore mal connus. Il nous a bien souvent entretenu de ses projets, il a fait construire à cette intention un objectif spécial ouvert à f/l dont la focale est de 17 cm ayant pour diamètre 17 cm et dont le poids atteint 31 kg.

Il a été chargé d’établir les plans et de surveiller la construction de la grande table équatoriale de l’Observatoire de Meudon. Cette coupole de 1 1 m de diamètre possède un plancher mobile qui permet à l’astronome de se trouver toujours à la hauteur de l’oculaire pendant la rotation de la lunette. En sa compagnie, et celle de M. LYOT, nous avons pu apprécier sa commodité au cours de l’éclipse totale de la lune, qui eut lieu la veille du bombardement des usines Renault, situées à 2000 m environ de l’Observatoire de Meudon. Nous ne pouvons pas entrer ici dans les détails des 230 notes et mémoires qu’il a pu publier. Nous citerons cependant les travaux de photométrie des comètes en collaboration avec M. Ch. BERTAUD, et son catalogue général des comètes publié en deux parties, en collaboration avec Mlle de OBALDIA. Dans la première il donne la liste des 1 619 comètes connues d’après les annales chinoises depuis l’an 2315 avant J.-C. jusqu’à la fin de 1948. Dans la seconde il a publié les orbites de 763 comètes depuis l’an 466 avant J.-C. jusqu’en 1952. Mis à la retraite en 1955 il a continué son travail, se rendant chaque jour à son laboratoire. Le dernier travail qu’il venait de terminer l’été dernier comporte une étude importante sur les météores, les météorites, les micrométéorites, etc., qui jouent un rôle primordial dans la recherche spatiale.

L’astronomie utilisant fréquemment la photographie, il a étudié les propriétés du gélatino-bromure d’argent, faisant part de ses résultats à notre Société au cours de communications verbales. Il a redécouvert le phénomène d’accroissement progressif de la densité de l’image photo­graphique après exposition et en a tracé la courbe en fonction du temps. D’autre part, il a été amené à composer un révélateur encore utilisé dans les laboratoires photographiques des observatoires, sous le nom de «Baldet ».

Il succéda au Duc de GRAMONT à la présidence de notre Société en 1946. Les membres du Conseil d’administration en fonction à cette époque se souviennent du tact et de la discrétion avec lesquels il présidait ces séances, assis en face de M. BELIN, alors président du Conseil d’administration.

Il avait conservé la nostalgie de la Société Française de Photographie d’avant 1939, cette Société à laquelle les chercheurs venaient communiquer le résultat de leurs travaux au cours des séances générales et qui publiait un bulletin tenant le rôle de compte rendu pour l’Académie des Sciences. Homme de science, mais artiste également il se souvenait de ses débuts comme dessinateur, il laissera son nom au palmarès des astronomes de la première moitié du XXe siècle, parmi ceux qui, ayant fait le travail préparatoire permettent maintenant aux jeunes générations d’envisager des réalisations grandioses, avec des moyens financiers formi­dables alors que leurs aînés étaient tenus de compenser l’absence de crédits par des trésors d’imagination

Le président et les membres de la Société Française de Photographie se joignent aux autres Sociétés scientifiques pour adresser à Mme BALDET et à sa famille leurs respectueuses condoléances.

Nous nous permettons d’adresser à notre Ami un adieu personnel qui laissera bien vivantes en notre mémoire les heures agréables passées en sa compagnie.

Dr OBATON.